01 June 2014

Un regard sur l’avenir


An English version of this article is published on PositiveLite.

Il y a quelques semaines, mon organisme a reçu une demande de la part d’une journaliste avec une mission spéciale. Son journal préparait un cahier spécial sur l’avenir du Québec et son rôle était de couvrir les questions de la santé. Nous avons répondu à son invitation de discuter du VIH au Québec en 2024 avec un gros « oui ».

Notre après-midi de réflexion comme équipe et mon entrevue avec elle d’au moins une demi-heure se traduisait (de ce que nous avons vu dans l’édition web) en deux lignes, avec une faute dans mon nom (ça m’arrive trop souvent). Insatisfait avec cela comme résultat et assez content du fruit de notre réflexion, je pensais que ce serait intéressant de partager notre vision ici. Gardons à l’esprit que le reste de ce billet s’écrit de l’année 2024…


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Tout commence par un grand titre dans le journal : Les statistiques de l’année 2023 démontrent qu’il n’y a pas eu de transmission du VIH au Québec au cours de l’année.

Comment sommes-nous rendus à ce résultat? Plusieurs facteurs y ont contribué.

Premièrement, des traitements efficaces avec peu d’effets indésirables sont facilement disponibles au Québec depuis une quinzaine d’années. Ces traitements permettent d’améliorer la qualité et l’espérance de vie des personnes vivant avec le VIH jusqu’au point d’égalité avec leurs pairs qui n’ont pas le VIH. Plusieurs études ont démontré que l’efficacité des traitements pour contrôler la charge virale sert également à rendre nul le risque de transmission.

De plus, il y a un consensus de santé publique à l’échelle mondiale de l’absence de risque de transmission par une personne vivant avec le VIH dont la charge virale est bien contrôlée en continue.

Deuxièmement, il y a eu une intensification des efforts de prévention et de conscientisation par rapport au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par voie sanguine.

La réussite des interventions auprès des personnes utilisatrices de drogues par injection — telles les services d’injection supervisée, les échanges de seringues, les liens vers les services de désintoxication adaptés et la réinsertion sociale (l’intervention globale pour la santé de la personne) — a servi de modèle pour l’intensification des efforts auprès de toutes les populations.

Le programme d’éducation à la sexualité est bien implanté dans les écoles et sert à encourager les jeunes à développer une sexualité saine et bien informée qui répond aux besoins et attentes de chacun. La gêne et le jugement ne font pas partie de ce programme.

Le dépistage est facilement disponible et adapté aux besoins des différentes populations. On voit le dépistage comme une façon normale de prendre en main sa santé, sans stigmatisation.

Il y a eu des campagnes d’information et de sensibilisation tant pour le grand public que pour des populations plus ciblées qui permet à toute la population de bien comprendre les moyens de transmission et de prévention, ainsi que les réalités vécues par des personnes vivant avec le VIH. Ces campagnes permettent une déstigmatisation du VIH et la normalisation de la vie des personnes qui ont été infectées dans le passé.

Il y a une grande disponibilité et compréhension de l’ensemble des outils et stratégies pour prévenir la transmission du VIH. Condoms et seringues sont librement disponibles pour ceux et celles qui en ont besoin, tout comme le soutien psychosocial, les traitements efficaces et les interventions de prophylaxie pré- ou post-exposition.

Troisièmement, des moments déterminants ont marqué le début de la fin de différentes pratiques discriminatoires qui ont frustré les actions dans le passé.

Il y a eu adoption de la position de l’ONUSIDA sur la question de la criminalisation du VIH : les poursuites sont limitées au cas de transmission intentionnelle du VIH et sont plutôt très rares, sinon inexistantes. Il n’y a pas eu de poursuite à cet égard au Québec depuis plusieurs années.

L’impact positif des traitements sur la qualité et l’espérance de vie des personnes vivant avec le VIH ont fait tomber des pratiques discriminatoires à l’emploi et aux assurances : il n’y a plus de justification d’exclusion de ces personnes et dans plusieurs litiges, des plaignants séropositifs ont eu gain de cause.

On voit clairement que l’élimination de la transmission du VIH s’est réalisée grâce à la combinaison de deux éléments : la reconnaissance et l’application de l’état de la science et le respect des droits de la personne. Dans l’absence de la stigmatisation, on peut discuter et déployer ensemble des stratégies efficaces de prévention.

Le VIH en soi n’est pas encore guéri, mais les chercheurs poursuivent des pistes de recherche qui promettent de mener à la guérison et à un vaccin efficace dans l’avenir proche.

Il reste aussi le défi de solidarité internationale : si nous avons réussi à éliminer la transmission du VIH au Québec et si nous sommes en voie de découvrir une guérison et un vaccin préventif, nous ne pouvons pas passer le devoir de partager notre réussite avec d’autres pays et populations qui n’ont pas nécessairement nos moyens financiers et de les aider à mettre en place les mêmes conditions de réussite.



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De retour au présent. Je ne crois pas que nos réflexions soient le produit de rêves irréalistes. Tous les éléments sont entièrement faisables avec un peu d’effort et détermination. Nous avons commencé par le grand titre de journal, mais nous avons également tracé une piste pour nous y rendre. Et la question à 100 000 $ : nos leaders politiques, ont-ils la détermination que ça va prendre?



1 comment:

Pierre-Henri said...

Atteindre cette réalité ne demandera de plus que très peu d'exceptionnel.

Nous posons déjà les prémisses de ce futur là.
Il nous le faut garder en tête !